Les Tontons Flingueurs : Un pastiche de grand cru du film de gangsters (1963)
Par Mathieu Lemée • 10 juin 2008 à 12:35
Vous ayant déjà parlé du talent et de l’humour du scénariste et dialoguiste Michel Audiard dans un précédent article sur le film « LE PRÉSIDENT », je ne pouvais pas ne pas vous parler de la comédie « LES TONTONS FLINGUEURS », considérée à juste titre comme étant l’un de ses chefs-d’oeuvre les plus marquants en matière de répliques et de réparties cultes vraiment drôles.
Un ancien gangster vivant maintenant dans la légalité, Fernand Naudin, est appelé à Paris par son ancien patron, un chef de bande qui se nomme Louis le Mexicain. Celui-ci, mourant, confie la conduite de ses affaires et la tutelle de sa fille Patricia à Fernand, ce qui ne fait pas du tout l’affaire de ses associés, particulièrement les frères Volfoni. En même temps que Fernand doit s’occuper d’une adolescente émancipée et s’assurer qu’aucun garçon ne s’intéresse à elle pour un futur héritage, il doit aussi échapper aux truands qui veulent le descendre et prendre sa place au sommet de la pyramide. Grâce à quelques personnes qui lui sont fidèles, Fernand ne se laisse pas faire et s’impose aux truands, surtout les frères Volfoni qui sont les plus réticents à l’autorité, et les enjoint à payer leurs redevances en retard. En revanche, il a beaucoup de mal à s’entendre avec Patricia, qui est amoureuse d’un jeune homme bavard de bonne famille, Antoine Delafoy, et dont Fernand ne veut rien savoir. Avec le temps, les choses s’arrangent et Patricia peut épouser Antoine grâce à quelques arguments qui ont convaincu Fernand. Il découvre aussi que les attentats contre lui ne sont pas le fait des frères Volfoni, mais de Théo, un gangster allemand et de quelques complices. Le jour du mariage de Patricia et d’Antoine, Fernand et ses tueurs se chargent donc d’éliminer Théo et sa bande.
Extraordinaire parodie des films de gangsters, cette comédie est devenue un film culte quasi fétichiste de par ses dialogues savoureux et truculents, écrits par un Michel Audiard au sommet de sa forme. Succès indiscutable lors de sa sortie, les spectateurs continuent encore aujourd’hui d’apprendre les répliques désopilantes du film par coeur. Le récit, très librement adapté d’un roman de la Série Noire de l’auteur Albert Simonin, fourmille de gags marrants, de personnages dépareillés aux attributs qui portent à rire et de scènes de bastons ou de « bourre-pifs » cocasses, tout comme les coups de revolver avec des sons de silencieux rigolos. Voici d’ailleurs quelques répliques amusantes du film pour vous mettre en appétit :
Pascal : À l’affût sous les arbres, ils auraient eu leur chance, seulement de nos jours il y a de moins en moins de techniciens pour le combat à pied, l’esprit fantassin n’existe plus ; c’est un tort.
Fernand Naudin : Et c’est l’oeuvre de qui d’après toi, des Volfoni ?
Pascal : Ce serait assez dans leurs sales manières ; Mr Fernand ? Je serais d’avis qu’on aborde molo, des fois qu’on serait encore attendu… Mais, sans vous commander, si vous restiez un peu en retrait… Hein ?
Fernand Naudin : Ouais, n’empêche qu’à la retraite de Russie, c’est les mecs qui étaient à la traîne qui ont été repassés… Les cons, ça ose tout. C’est même à ça qu’on les reconnaît.
Pascal : La psychologie, y en a qu’une: défourailler le premier.
Théo : C’est un peu sommaire, mais ça peut être efficace.
Maître Folace : Quand le lion est mort, les chacals se disputent l’empire. Enfin, on ne peut pas en demander plus aux Volfonis qu’aux fils de Charlemagne.
Le Méxicain : Tu sais combien ça laisse une roulette? 60% de velours!
Fernand Naudin : Et sur le plan des emmerdements, 36 fois la mise!
Le réalisateur Georges Lautner règle le tout avec beaucoup d’équilibre dans une mise en scène vigoureuse qui participe au ton de pastiche de l’ensemble. Comme en plus, l’intrigue ménage quelques surprises et des rebondissements loufoques surprenants, il est difficile de trouver des défauts à ce film qui est presque aimé à l’unanimité chez le public et la critique. Cet ensemble désinvolte où les règlements de compte entre gangsters sont tous traités à la blague, bénéficie en plus d’une musique de circonstance du compositeur Michel Magne et d’un casting européen du tonnerre (co-production oblige!); chaque rôle semble avoir été écrit de toute évidence sur mesure pour les acteurs qui les incarnent respectivement. Ceux-ci en profitent d’ailleurs pleinement pour s’amuser ferme avec une gaieté contagieuse. Bref, un monument cultissime qui fait toujours rire une nouvelle génération de spectateurs. Un must absolu et incontournable pour ceux qui aiment les grands crus de la comédie française (disponible au Québec en DVD).
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