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ÉditorialPuisqu'il y a des choses qui doivent être dites, aussi bien les dire avec une verve franche et directe. Des sujets chauds, traités vivement sans trop de fioritures.

Un nez de clone

Par • 17 janvier 2008 à 0:00

Voilà. Ça fait plus de dix ans que le clonage est une réalité dans nos vies, qu’il est devenu un nouveau problème éthique, complexe et passionnant à la fois. Après des tests concluants au début de 1996, la brebis Dolly, premier animal officiellement cloné à partir de cellules d’un autre spécimen, naissait l’été suivant. Après une vie courte mais tout à fait normale, la bête s’est éteinte en 2003, totalement ignorante du débat qui avait fait rage sur la moralité de son existence même. Depuis, on a vu les Raéliens jongler avec l’opinion publique sur la question (avouez que le coup de marketing était fameux, à l’époque), et les scientifiques qui, comme il fallait le prévoir, commencent à montrer des failles dans leur mur d’autocensure sur le sujet.

 

On en parle moins, on a tendance à moins tendre l’oreille, mais le clonage est un de ces sujets, comme les accommodements raisonnables voilà dix-huit mois, sur le point d’exploser, de voir s’embraser les passions d’un côté comme de l’autre, pour de bon. À gauche, ceux qui sont toujours scandalisés de voir l’Homme jouer à Dieu, toujours un pas plus loin, peu importe la moralité de l’acte. À droite, les gens qui commencent à y voir un potentiel commercial, médical, voire humanitaire. Le second tend à prendre de plus en plus de place, et je dois dire qu’après mûre réflexion, cette position me semble la meilleure. Ça m’a pris plus de dix ans pour le réaliser.

 

On peut longuement argumenter sur ce qui est acceptable ou non dans les progrès de la science, les territoires qui ne devraient pas être touchés, etc. C’est évident que de cloner un être humain pour lui faire passer sa vie en observation, lui garantissant ainsi une existence misérable, c’est pousser un peu trop loin. Mais quand on parle de cloner des tissus, des cellules, des organes, je suis pour. Totalement, complètement pour. Guérir les maladies, réparer le corps humain, c’est un peu se prendre pour Dieu, pourtant ça me semble parfaitement honorable. Jouer à Dieu pour soulager la souffrance, pour trouver des solutions à des problèmes qui rongent (dans tous les sens du terme) le corps humain ? Oui, pourquoi pas ?

 

Je vais même renchérir : le clonage, dans la forme que l’on désire maintenant lui donner, pourrait bien être une solution (peut-être pas LA solution, mais tout de même) à la faim dans le monde, et même aux problèmes économiques de certaines nations. Comment ? Le clonage animal et végétal. Sûrement que certains bien-pensants monteraient aux barricades, n’ayant qu’une poignée d’arguments de principe à présenter, mais si on regarde froidement les avantages de ces nouvelles possibilités, on est vite dépassés par l’énorme potentiel qu’ils représentent pour les populations affamées du monde entier. Accepteriez-vous, si l’on vous confirmait que ces aliments clonés étaient parfaitement sans danger pour la santé (quoiqu’une frite va toujours rester une frite), de voir des usines fabriquer ces denrées qui seraient ensuite distribuées à prix ridicule, ou même gratuitement, à ces gens dans le besoin ? Oui, sans doute. Et probablement que nos amis au ventre vide l’accepteraient volontiers eux aussi… Eh bien pas plus tard que cette semaine, des recherches sérieuses et très poussées n’ont trouvé aucune différence entre les aliments clonés et la nourriture conventionnelle. Non, pas de blob gluant qui déchire violemment l’estomac des mangeurs de bouffe clonée dans cette recherche. Pas non plus de cancer instantané des intestins, ou de copieux renvoi revolant partout sur les erlenmeyers et les éprouvettes. Non, en fait tout est beau. Pourtant, ça fait presque aussi peur que les méchants OGM, une autre frayeur collective qui est en train de disparaître, à défaut d’être justifiée.

 

On connaît déjà les avantages médicaux du clonage, la reproduction d’organes en parfaite santé en étant probablement l’exemple le plus connu et le plus prometteur. Vous avez un cancer des poumons ? Si vous êtes prêts à subir une greffe (et que votre corps, évidemment, ne rejette rien), tout cela pourrait n’être qu’un mauvais moment à passer, dans un futur proche, parce qu’on vous en mettrait des nouveaux. Votre nez a été arraché lors d’un terrible et sanglant accident de travail ? Et hop, un nez tout neuf en plein milieu du visage. Évidemment, le clonage nous démontrera ses limites tôt ou tard, et il ne faut pas sombrer dans un optimisme qui pourrait mener à l’excès et à la déception. Mais maintenant que le monde a réagi de façon réfractaire pendant plusieurs années à un phénomène vague et inconnu qui soulevait de réelles questions éthiques, peut-être est-il maintenant temps qu’on regarde l’autre côté de la médaille. Le bon côté.

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10 Réponses »

  1. Je vais jouer l’avocate du diable mais le clonage n’est pas nécessairement LA solution à tous les maux comme vous le dites si bien. C’est encore du « patchage ». Faire de la bouffe clonée pour les pauvres? C’est quoi cette blague de mauvais goût? Cloner un enfant jumeau pour pouvoir sauver celui qui se meurt? Cloner un poumon pour en remplacer un autre? Une science pour les riches, encore et encore. Au lieu de travailler sur nos relations avec les gens, au lieu de tenter d’équilibrer nos forces, on a encore recours à une utopie pour calmer nos maux. Ça me répugne, bien franchement! L’industrie pharmaceutique est une blague à elle-seule. Je ne dénigre pas qu’il y ait des progrès dans la science mais c’est un marché beaucoup trop lucratif pour être vraiment fait dans les règles de l’art. Avant que le clonage soit une activité accessible pour tout ce que vous nous décrivez M. Habel, trop d’eau aura coulé sous les ponts et beaucoup de gens y auront payé de leur vie. Je suis une scientifique moi-même, et je commence à me rendre compte que la science de va pas solutionner tout. Notre égocentrisme nous tue à petit feu dans tous les domaines de notre merveilleuse ère technologique. Le clonage n’est qu’un exemple parmi tant d’autres recettes miracles inventées par les mieux nantis pour se sentir moins coupables de « fourrer » le reste du monde. Je n’y crois pas, pas dans le sens humanitaire. Désolée.

  2. Moi j’ai toujours été pour le clonage. Même quand on n’en savait pratiquement rien il y a plusieurs années. Je suis peut-être un louveteau sans morale, mais la science et ses innovations me fascinent. Je ne me pose pas vraiment la question à savoir si c’est bien de faire évoluer un homme sous les projecteurs et le regard de l’humanité. Mais si c’est le prix à payer pour découvrir les merveilles qui se cachent derrière tout ça, why not. Je serais fier d’être le premier clone moi! Ça torche un clone!! – Est-ce que c’est ton frère jumeau ? Non, c’est mon clone! Ça dégaine comme réponse je trouve… Ok j’arrête!

  3. À Amélie : j’ai justement pris le soin de dire que ce n’était pas LA solution, loin de là. Et évidemment que ce serait un miracle, même si cela ne jouait qu’un rôle minuscule. Ceci dit, croire encore que l’Humanité va tout d’un coup (ou même sur une période de quelques siècles) devenir juste et bonne, compatissante et compréhensive, ça c’est utopique à fond.

    L’être humain ne peut pas concevoir une telle justice. C’est dans notre nature d’avoir un déséquilibre constant. J’imagine que tu ne donnerais pas la majeure partie de ton argent et tes biens à de petits Congolais juste par esprit de justice. Clonage ou pas, il va toujours y avoir des assassins et des victimes, des riches et des pauvres, des puissants et des faibles. Si jamais le clonage d’aliments se faisait (et j’en parlais parce qu’il commence à y avoir un attrait pour cela dans l’industrie), je serais à 100% d’accord que cela serve à créer une telle abondance mondiale de nourriture que, malgré toutes les injustices qui pourraient continuer à avoir cours, certaines gens mangent finalement à leur faim.

    Ceci dit, ton sursaut d’indignation montre que tu es une bonne personne bien intentionnée. Je pense juste que tout n’est ni noir ni blanc, et que ça ne sert à rien de dire « non » à une question qui n’a pas encore été posée.

    À Pierre-Luc : moi je voudrais pas être le sacrifié, celui qui vit de force dans une bulle de plexiglas, nourri et observé comme un animal en cage, jusqu’à ce que ma courte vie se termine. C’est vrai que ça torche comme réponse (même si ça durerait juste un temps), mais toi et moi savons bien sûr que ça implique plus que ça 😉

  4. Bonjour
    J’ai adoré cet article, enfin quelqu’un qui se pose les vraies questions et qui amène quelques réponses sensées…
    En tant que raëlien, ça fait très longtemps que j’entends déjà ce discours, voir encore plus progressiste, Raël, il suffit de l’écouter, son discours « torche » encore plus que ça, mais c’est Raël et c’est pour cela que personne ne l’écoute, dommage, on gagnerait vraiment beaucoup de temps…. mais bon c’est le choix de chacun.

  5. Attention, j’ai bien dit que le clonage humain (en parlant bien sûr d’une personne « complète », et non la simple duplication d’organes) est, d’après moi, toujours quelque chose de condamnable. Pourquoi ? Tout simplement parce que cela ne servirait à rien, sinon à torturer par une observation de tous les instants ces échantillons vivants, produits d’une expérience scientifique aux limites de la cruauté. Pour le genre d’informations que cela pourrait nous fournir, les coûts dépassent infiniment les dividendes.

    Mon argumentation visait plutôt le fait que, oui, le genre humain est toujours effrayé par l’inconnu et le nouveau. Cela transparaît partout, autant dans le monde artistique que scientifique, politique ou autre. Et que maintenant que nous avions eu le temps de faire le point sur ce sujet en particulier, de voir que les clones ne sont toujours pas parmi nous, zombies grouillants et titubants, nous pouvions nous permettre une perspective plus ouverte, plus positive sur cette avancée scientifique, car c’est bel et bien d’une avancée dont on parle.

    Quant à Raël, sauf votre respect, je ne lui accorde qu’un certain jugement « marketing » avec lequel il a d’ailleurs eu du mal à jongler, et ce, dans le but à demi avoué de faire parler de lui. Peut-être monsieur Vorilhon torche-t-il en effet, malheureusement ce n’est pas la conclusion à laquelle j’ai abouti en lisant la première moitié de son livre. Ceci étant dit, merci sincèrement de votre commentaire.

  6. Je pense que l’identification du propre clone peut paraitre un peu affirmatif par rapport au dispositif d’émargement.

  7. …pardon ?

  8. Je suis entièrement d’accord dans ce que vous dites sur le clonage, le clonage reproductif, juste pour créer des humains supplémentaires n’a aucun intérêt en soi, c’est même criminel car cela agrave la surpopulation mondiale.
    Raël explique dans son livre que l’intérêt du clonage reproductif est de remplacer une personne existante, par exemple reproduire un enfant mort en bas age, aider les couples qui ne peuvent pas avoir d’enfant, ou finalement permettre à une personne d’être éternelle. Avant la mort on pourra uploader notre être, c’est à dire notre mémoire, notre conscience et tout ce qui fait ce que l’on est, puis se faire cloner et downloader ce que l’on avait sauvegarder, un peu comme lorsque l’on fait une sauvegarde d’ordinateur, bien sur c’est une perspective d’avenir, mais cela est envisageable.

  9. Je ne suis pas sûr de souhaiter cela. La mort, c’est plutôt désagréable, mais au moins ça permet d’apprécier la vie, parce qu’on ne sait jamais quand on va partir. Dans ce genre de « reproduction », on se débarrasse de la sexualité, on nie le deuil, et on fuit la réalité. Pour toutes ces raisons, et bien d’autres (mais aucune qui soit de nature strictement morale), je suis contre le clonage d’un être humain en tant que tel. Se servir du clonage pour réparer le corps humain, d’accord. Remplacer des corps humains au complet comme quelque chose qui a fini d’avoir une utilité, non.

  10. Source SVP! Merci

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