Charest majoritaire, Dumont démissionne
Par Dominique Fortier • 12 décembre 2008 à 9:47Ça y est! Le Québec a décidé. Jean Charest sera à la tête de la province pour les prochaines quatre années. Loin d’être le mandat majoritaire qu’il espérait, il s’en tire tout de moins avec 66 sièges sur 125, détruisant au passage l’opposition adéquiste de 2007.
Très tôt dans la soirée, les grands réseaux annonçaient en grande pompe que les Libéraux allaient former un gouvernement majoritaire. Toutefois, le suspense a duré jusqu’à la toute fin puisque des luttes très chaudes se sont dessinées dans au moins une vingtaine de comtés. Le Parti Québécois a fait bonne figure en allant chercher 51 députés et ainsi reprendre le contrôle de l’opposition officielle. L’ADQ de Mario Dumont a ramassé des miettes en réussissant à faire élire un maigre sept députés. Parmi ceux-ci, Gérard Deltell, ancien journaliste de TQS, qui a réussi son entrée en politique et Éric Caire qui conserve sa circonscription. Sébastien Proulx, Simon-Pierre Diamond et 32 autres députés adéquistes ont mordu la poussière. Mario Dumont a d’ailleurs volé la vedette en annonçant dans son discours de fin d’élection, son retrait de la vie politique après 14 ans à la tête de son parti.
Pauline Marois, qui avait peine à contenir une foule péquiste en délire sort gagnante de cette élection en remettant sur la carte le PQ laissé en bien mauvaise posture depuis le départ d’André Boisclair. D’ailleurs, à regarder les militants rassemblés pour accueillir leur chef, on croyait être dans une assemblée étudiante de CÉGEP. La moyenne d’âge devait facilement tourner autour de 30 ans maximum. Tout le contraire des Libéraux où les têtes blanches ressortaient de partout! Pauline a réussi son pari en donnant un deuxième souffle au mouvement souverainiste. « La prochaine foi sera la bonne » a-t-elle déclaré en fin d’allocution.
Un nouveau parti a également fait son entrée à l’assemblée nationale grâce à Amir Khadir qui a défait le péquiste Daniel Turp dans la circonscription de Mercier. L’atmosphère était électrisante au rassemblement des Solidaires. Interrogée sur le départ de Mario Dumont de la vie politique, la chef de Québec Solidaire, Françoise David s’est dit ravie de voir l’ADQ planter du nez et redevenir un parti marginal. Un parti qui, toujours selon Mme David, va à l’encontre des valeurs sociales démocrates et qui est beaucoup trop conservateur.
Pour ceux qui ont suivi ma couverture des élections dans mon comté de Ste-Marie-St-Jacques, le péquiste Martin Lemay a conservé son siège avec une majorité de presque 5000 voix sur le libéral Éric Prud’homme. Manon Massé de QS a récolté 3000 voix et même Annie Morel du Parti Vert a amassé plus de 1000 voix laissant Dominic Boisvert de l’ADQ au quatrième rang avec plus ou moins 800 voix. Je tiens d’ailleurs à remercier M. Lemay, M. Prud’homme, Mme Massé et M. Boisvert d’avoir bien voulu se prêter au jeu des 11 questions. Les lecteurs de DimancheMatin ont grandement apprécié le sérieux et l’ouverture que les candidats ont fait preuve lors de ces entrevues.
Une petite réflexion personnelle pour terminer. Tout le monde a critiqué Jean Charest d’avoir déclenché des élections en pleine crise économique alors que nous sortions à peine d’une élection fédérale avec raison. Résultat? Les Québécois ont voté pour les Libéraux dans une proportion de 42% donnant ainsi à Charest la majorité qu’il sollicitait. Alors je ne veux plus entendre personne se lamenter contre le gouvernement! On a les politiciens qu’on mérite. Et clairement, les Québécois n’étaient pas assez « écoeurés » de Jean Charest puisqu’on l’a remis au pouvoir pour une troisième fois. Quant à Pauline, je suis heureux qu’elle ait finalement réussi à faire taire ses détracteurs en allant chercher 35% des suffrages. Elle aura fait mieux que Bernard Landry et mieux que Boisclair, évidemment. Pas si mal pour une chef qui avait perdu toutes ses courses au leadership et qu’on avait sorti de la retraite sans trop y croire. Puis il y a Mario. Quoi qu’on en pense, il aura quand même réussi à faire élire 41 députés lors du dernier scrutin, dont plusieurs étaient sortis de nulle part pour reléguer le Parti Québécois au fond de l’assemblée nationale. Pendant 14 ans, il a tenu son parti à bout de bras, ayant le mérite d’avoir ouvert plusieurs débats sur des sujets aussi tabous que le taux d’immigration et les accommodements raisonnables. Et si on regarde les accomplissements du dernier gouvernement alors que Mario était dans l’opposition, force est d’admettre que plusieurs idées mises de l’avant sortaient tout droit du programme adéquiste. Merci Mario pour ta contribution à la vie politique et bon succès dans tes projets futurs. La politique est ingrate. Sans merci. Un jour on est considéré comme un héros, le lendemain, on se fait montrer la porte de sortie. L’histoire l’a démontré à multiples reprises. On a qu’à penser à Bernard Landry, André Boisclair, Paul Martin et plus récemment Stéphane Dion. Il est difficile de réussir sa sortie en politique.
Finalement, Québec Solidaire, un tout jeune parti qui réussit à faire élire son premier député, Amir Khadir. Est-ce une « conspiration de la clique du plateau » ou bien un véritable mouvement de masse vers un nouveau parti social-démocrate? L’avenir le dira! Reste à voir comment Jean Charest va gouverner la province maintenant qu’il a obtenu sa majorité. Va-t-il vouloir se venger de l’opposition pour tous les projets de loi qui ont été bloqués? Retrouverons-nous un premier ministre arrogant et dictateur? Ou allons-nous avoir droit à un Jean Charest conciliant et à l’écoute des citoyens? Quelque chose est certain toutefois; il n y a plus rien qui ne se dresse sur son chemin à l’assemblée nationale pour faire adopter tous les projets qu’il veut. Il n’en tient plus qu’aux citoyens de monter aux barricades lorsqu’ils seront en désaccord avec le gouvernement. Comme les étudiants l’ont fait pour les frais de scolarité, comme les syndicats l’ont fait pour les conventions collectives de la fonction publique, comme les électeurs l’ont fait contre le financement total des écoles juives, etc. Le devoir de contester ce qui semble à l’encontre des valeurs collectives revient dorénavant aux électeurs. Ce n’est pas un droit mais bel et bien un devoir. Avec un gouvernement minoritaire, le parti au pouvoir se doit de marcher droit. Mais en situation majoritaire, le gouvernement a le champ libre. Et quatre ans, ça peut être long. Très long.
Par Dominique Fortier
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Sylvie R. Tremblay
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