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La Traversée de Paris : L’occupation allemande en humour noir

Par • 25 novembre 2008 à 11:41

Pendant la guerre sous l’occupation allemande en France, Marcel Martin, un pauvre musicien, travaille à faire le trafic de victuailles au marché noir pour le compte de l’épicier Jambier. Il rencontre Grandgil, un peintre très admiré des Allemands et en bonne situation économique, qui se propose de l’aider en l’accompagnant pendant une nuit. Au moment d’aller chercher le cochon à transporter pour un riche parisien, Grandgil surprend Marcel en faisant chanter subtilement Jambier sur les victuailles qu’il cache dans son sous-sol. Jambier paye le peintre pour avoir la paix et les deux livreurs se mettent en route. Pendant le trajet, Grandgil souligne avec dureté et cynisme l’hypocrisie des Français riches et pauvres. Marcel, qui a peur de perdre son boulot et qui ne veut pas d’histoire, se demande bien pourquoi Grandgil l’accompagne et agit de cette manière. Il apprend à ses dépends que Grandgil agit par curiosité afin de voir jusqu’où les Français peuvent aller en période d’occupation. Les deux hommes sont finalement arrêtés par les Allemands et ne se reverront qu’après la guerre; chacun ayant connu des destins bien différents.

 

Adapté de la nouvelle de Marcel Aymé, le film propose une vision noire et cruelle de la France occupée, loin de la mythologie de la Résistance et de l’héroïsme patriotique. Avec un humour noir féroce jusqu’à faire rire jaune n’importe qui et un dialogue brillant, ce « road-movie » à pied dans un Paris qui crève de faim ne fait aucune concession optimiste pour illustrer l’hypocrisie des Français affameurs, lâches et profiteurs. Autant les pauvres que les riches, les collabos et les anti-nazis sont magistralement passés dans le tordeur grâce à une mise en scène brillante. Le rythme ne traîne pas et les épisodes s’enchaînent joliment tout en faisant ressurgir les mauvais souvenirs des compromissions de l’époque. Ce film possède donc une valeur historique indéniable et le succès public énorme en France démontre à quel point les Français n’ont toujours pas digéré l’Occupation.

 

Mais l’élément le plus jubilatoire du film se situe dans l’extraordinaire interprétation des acteurs qui nous donnent droit à quelques morceaux d’anthologie. Qui ne se rappelle pas en effet la scène où Gabin crie le nom de Jambier à pleins poumons dans le sous-sol de l’épicerie alors que le visage de de Funès (Jambier bien sûr!) est pris de tics incontrôlables de contrariété comique pendant que Bourvil ne sait pas trop quoi faire avec son air ahuri. D’ailleurs, jamais on ne reverra un tel trio d’acteurs réunis avec cette qualité de jeu. Si Gabin et Bourvil forment cependant le tandem vedette, la performance de de Funès est tout aussi mémorable dans un rôle plus mineur. Une comédie pas comme les autres.

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