Voir la mort de près (2e partie)
Par Dominique Fortier • 3 septembre 2008 à 0:00
Ce texte fait suite à Voir la mort de près (1ère partie)
Sentant mes doigts glisser doucement mais sûrement du toit glacé, le temps de réflexion s’amenuisait plutôt rapidement. Ayant envisagé avec très peu d’enthousiasme l’option de me laisser choir sur la glace 30 pieds plus bas, j’optai pour le garde-corps. Je me laisse donc tomber en tentant de m’accrocher à cette clôture et en tenant de limiter les dégâts. Weeeeeeeee! À la grâce de Dieu!
À peine quelques secondes plus tard, tout était terminé… ou presque! Je pendais toujours dans les airs mais cette fois-ci accroché à une clôture peu stable à bouts pointus. Mon bras gauche tenait solidement entre deux pics verticaux. Ouf! J’avais été chanceux. Puis une sourde douleur parcouru mon corps de la pointe de mes cheveux bleus jusqu’au bout de mes orteils dodus. Hmmmm… Qu’est-ce que c’était? Je pivotai ma tête vers la droite pour me rendre compte que mon bras gauche n’était pas la seule raison pour laquelle je tenais si solidement au garde-corps. En fait, l’autre côté de mon corps avait trouvé son nid SUR un pic vertical à bout pointu… Pas bon… Pas bon du tout. En fait, pendant ma chute, alors que mon bras gauche s’accrochait désespérément au rail, le bras droit, pour sa part, avait eu moins de chance. Je m’était empalé sous l’épaule droite. Un des pics verticaux (à bouts toujours aussi pointus) avait pénétré allègrement sous mon bras me retenant ainsi dans le vide. Je ne peux que m’imaginer s’il y avait eu des spectateurs!
Ayant maintenant réalisé l’étendue da ma fâcheuse position, rien n’était encore réglé! Je devais retourner sur le balcon. Bon, bon, bon… À ce point-ci, il ne restait plus qu’à sauter de l’autre côté de la clôture et mettre cette stupide mésaventure derrière moi. Je balançai donc mes jambes afin de m’accrocher à la clôture. Et alors que j’essayai de libérer mon bras droit de ce pic vertical (à bout diaboliquement pointu), je senti comme un spasme parcourir mon corps avec un bruit frissonnant de métal qui me déchirait les tripes et la peau. Je sautai alors de l’autre côté du rail. Ayant une petite idée de ce que pouvait avoir l’air le dessous de mon bras, je décidai de m’épargner le film d’horreur. Je contractai mon bras droit contre mon corps pour éviter une hémorragie et ainsi m’imaginer que tout était correct.
Je me dirigeai doucement vers les escaliers pour retourner à l’avant de mon bloc appartement. Je me sentais soudainement faible, étourdi. C’est à ce moment que je vis au loin, un punk avec un mohawk et des pantalons de l’armée. Mon coloc Nicolas revenait allègrement d’une ballade dans le parc. C’était bien le temps. N’aurait-il pas pu revenir dix minutes plus tôt?? Ses premiers mots lorsqu’il me vit furent : « T’es ben blanc ! » Je lui racontai alors mes péripéties. Mon souffle devenait haletant et les étourdissements s’intensifièrent. Nico-le-punk-Français eu alors la brillante idée de m’amener à l’hôpital situé juste en face de notre logement. C’était une sage décision!
Arrivé à l’urgence de l’hôpital Fleury, je fus immédiatement pris en charge. On me coucha sur une civière et en l’espace de quelques minutes, je me retrouvais en salle d’observation où fourmillaient plusieurs infirmières et deux médecins, visiblement pas sur leur quart de travail. Aucun sarrau, aucun stéthoscope au cou. Pourquoi tant de monde autour de moi pour une simple lacération sous le bras? À ce point de l’histoire, je n’avais toujours pas osé regarder l’étendue des dégâts sous mon bras. Le reste est un peu flou puisque je vacillais entre le conscient et les bras de Morphée. Je sais qu’on m’a fait passer des radiographies et plusieurs tests mais j’avais peine à rester éveillé. La question qui me dévorait était de savoir pourquoi autant de monde s’occupait de moi quand d’habitude, on a peine à avoir une infirmière lors de nos passages à l’urgence. Après les tests complétés, je demandai au docteur pourquoi ils semblaient si inquiets.
Le docteur à la barbe blanche m’annonça alors que deux pics avaient pénétrés dans mon corps et que l’un deux s’était logé à 2 centimètres de mon poumon. S’il avait atteint le poumon, celui-ci aurait été perforé et conséquemment, vu mon statut d’asthmatique, j’aurais bien pu quitter ce monde faute d’oxygène. Eh oui, la raison pour laquelle il y avait tant de personnel médical à mon chevet était qu’ils craignaient que mon poumon soit perforé. Heureusement, les pics n’ont atteint aucun organe vital. Je fus alors transféré à l’hôpital Sacré-Cœur où on me fit une douzaine de points de suture. Pendant cette délicate intervention de couture corporelle, je décidai que je n’avais pas plus envie de voir de quoi avait l’air mon corps à cet endroit. J’en fus quitte pour une sacrée frousse. On me donna mon congé dès le lendemain. Aucune séquelle à part un manteau déchiré que je porte encore aujourd’hui qui me rappelle cette (très évitable) mésaventure.
En sortant de l’hôpital, je me dirigeai allègrement vers mon appartement en me jurant que jamais plus j’allais sortir sans mes clefs!
Par Dominique Fortier
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Oh là là… tu as le don de raconter toi!! Je suis contente que tu t’en sois sorti plutôt indemne! Veux-tu bien te tenir tranquille ? 😀