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ÉditorialPuisqu'il y a des choses qui doivent être dites, aussi bien les dire avec une verve franche et directe. Des sujets chauds, traités vivement sans trop de fioritures.

Plastique ou liquide?

Par • 27 mars 2010 à 23:18

On parle depuis longtemps d’alternatives viables à l’argent liquide.  Pourtant depuis les premières décennies du XVIIe siècle jusqu’à aujourd’hui, on utilise encore la bonne vieille monnaie et l’argent en papier.  Mais est-ce que cette méthode de paiement est appelée à disparaître un jour?  La venue de l’argent électronique est-elle prédestinée à éclipser complètement Laurier sur papier?

Les statistiques à cet effet tendent à démontrer que de plus en plus, les gens se tournent vers les cartes de débit et l’argent virtuel ou le porte-monnaie électronique.  Si on prend exemple sur les transactions effectuées avec un terminal Interac, la valeur en dollars de ces transactions a passé de 18 milliards par année en 1995 à près de 125 milliards en 2004.  Le nombre de terminaux a aussi fait une impressionnante remontée dans les commerces au détail passant de 190 000 il y a dix ans à près de 550 000 aujourd’hui.

Les sondages faits auprès des consommateurs vont dans le même sens.  86% des Québécois détiennent une carte de débit et 47% de la population active préfère le paiement plastique versus la reine sur un trente sous.  En fait, un maigre 29% des consommateurs disent affectionner l’argent liquide comme mode de paiement numéro un.  Pourtant, malgré ces statistiques, Ginette Crew de la Banque du Canada voit les choses autrement.  L’analyste principale de l’institution monétaire gouvernementale affirme : « La demande de billets de banque continue d’augmenter chaque année en dépit de l’introduction de nouveaux modes de paiement. »  Mme Crew poursuit en disant qu’en 2004, il y avait plus de 4 milliards de billets en circulation, représentant un montant global de 41 milliards de dollars.

La Banque du Canada se tient à jour des développements reliés aux autres modes de paiement.  Toutefois, Ginette Crew est d’avis que l’argent liquide va demeurer un outil pratique et rapide qui sera utilisé parmi un éventail de possibilités pour régler les transactions.  Toutefois, les statistiques tentent à vouloir se contredire.  L’association Interac qui effectue elle-même ses études de marché propose des résultats plutôt avantageux pour ce qui est de l’utilisation de la carte tandis que la Banque du Canada nous parle de l’augmentation de la production des billets de banque.

Et la fraude?  Et la contrefaçon?  Existe-t-il une façon plus sécuritaire qu’une autre pour effectuer ses transactions?  Ginette Crew est d’avis que les billets de banque sont très sécuritaires puisque la Banque se tient au courrant de ce qui se fait en terme de contrefaçon.  « Nous nous tenons à l’affût et nous modifions les dispositifs de sécurité lorsque les billets deviennent trop facilement falsifiables. »  De l’autre côté de la clôture, l’association Interac déplore le fait que lorsqu’on perd son porte-feuilles, on perd tout l’argent liquide qu’il y a à l’intérieur.  Avec la carte Interac, si un client est victime d’une fraude, son établissement financier va absorber les pertes pour ne pas pénaliser le client.  C’est vrai dans certains cas, mais l’histoire a démontré qu’il n’est pas toujours facile de convaincre sa banque que l’on a été victime de fraude.  Et le problème demeure que les établissements financiers sont les seuls à pouvoir soulager leurs clients d’une perte monétaire reliée à leur système.  Que reste-t-il comme alternative?  Le troc?

Pour ce qui est de la meilleure façon de régler ses achats, la Banque du Canada soutient que les commerçants comme les épiceries et les dépanneurs préfèrent toujours les billets de banque.  De cette façon, les petites entreprises n’ont pas à débourser pour un terminal Interac et les clients ne paient pas de frais d’administration en retour, de soutenir Ginette Crew.  On voit aussi de plus en plus d’exploitants se servir d’Interac comme les taxis ou les livreurs de restaurants.  On voit même de plus en plus de gens payer le pourboire de leur serveur (euse) par débit avec le montant de la facture.

En ce qui a trait à l’avenir des modes de paiements, on assiste déjà à un renouveau avec l’argent virtuel où il est dorénavant possible de payer ses achats par Internet sans intermédiaires.  On parle également de cartes à puces qui serviraient de cartes de paiements un peu comme des cartes téléphoniques prépayées.  De cette façon on diminue les risques de pertes.

Afin de définir les véritables risques et pertes pouvant être encourus lors de transactions en espèces, il faut mettre en lumière certains faits.  À cet égard, le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada et le ministère des transports prennent en exemple les bureaux régionaux et les centres de Transport Canada.  On y constate qu’il peut y avoir au-delà de 80 000$ en transactions qui se font par paiement en espèces.  Ces sommes sont versées entre autre pour les examens et les délivrances de licence.  Ce qu’on reproche à Transport Canada est la mauvaise division des tâches entraînant des risques de fraude plus élevés.  Par exemple, le commis responsable de la perception des paiements en espèces est la même personne mise en charge des reçus officiels.   Le rapport encourage donc les bureaux régionaux à diminuer le plus possible le nombre de transactions en argent comptant et mieux diviser les tâches parmi les employés ayant à gérer des transactions en espèces.

Par contre, même si on se dirige de plus en plus vers des modes de paiements alternatifs, l’argent comptant demeure dans les mœurs des gens surtout lorsqu’il s’agit de transactions mineures.  Mais à qui bénéfice le plus le paiement par argent comptant?  À cet effet, un rapport du ministère de la Sécurité publique parle des milieux interlopes qui s’imaginent mal transiger l’achat de 100 livres de marijuana par Interac.  En effet, les milieux criminalisés couvrent très bien leurs traces en exécutant leurs transactions en espèces.  Un jeune trafiquant voulant garder l’anonymat parle des avantages de l’argent comptant : « Il est clair que lorsque je vends de la drogue, je suis payé ‘cash’ et je ne peux pas me permettre d’aller déposer cet argent dans un compte de banque.  Il faut être prudent surtout lorsqu’on a pas de salaire déclaré.  On ne sait jamais qui va venir fouiller dans mon compte de banque. »  D’ailleurs, saviez-vous que si vous vendez de la drogue, même si c’est illégal, vous devez le déclarer quand vous faites vos impôts?…

Où se dirige l’argent papier?  Est-ce qu’on transigera encore avec la Reine et les huards dans 50 ans d’ici?  L’avenir nous le dira mais quelque chose qui est certain est que la venue de l’informatique a réduit substantiellement l’utilisation de l’argent comptant.  Mais avec la fragilité des nouvelles technologies, reste à savoir à quel point il est plus sécuritaire de tout transiger virtuellement ou par plastique!

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