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Chronique entre-actesLe milieu de la télévision et l'art de la scène est beaucoup plus complexe que ce qu'on peut s'imaginer. Incursion dans les dessous de ces formes d'art qui font partie intégrante de nos vies.

Une simple formalité administrative

Par • 8 août 2007 à 18:12

Je reviens tout juste d’un merveilleux séjour de quelques heures dans un édifice administratif de la ville de Montréal.  Après m’être présenté au guichet numéro 2 avec le laissez-passer A89, on m’a imprimé une dizaine de feuilles en me disant de me rendre dans un autre édifice l’autre côté de la rue afin d’obtenir le laissez-passer E7 et finalement me rendre au guichet 11 où on m’a remis le formulaire 06.71.161-0.  En me remettant ce merveilleux formulaire (que je n’ai pas eu besoin) on m’a renvoyé au guichet 3 du premier building où on m’a remis le formulaire jaune qui me disait de me revenir jeudi prochain pour rencontrer quelqu’un entre 9h et 17h.  Je devrai donc me présenter à 9h en ne sachant aucunement quand pendant la journée je pourrai rencontrer quelqu’un…

 

Ceci est une histoire vraie.  Et celle que je vais vous raconter l’est aussi.  Et elle démontre à quel point le gouvernement peut compliquer la vie aux jeunes cinéastes.  Je suis metteur en scène depuis 12 ans et j’ai monté des pièces de théâtre par dizaines.  Je voulais prendre un de mes scénarios et l’adapter au cinéma.  J’ai donc fait une demande à la SODEC où j’ai rempli de multiples formulaires et que j’ai dû faire imprimer en 3 exemplaires.  J’ai dû remplir des prévisions budgétaires (?).  Ah oui?  Comment prévoir combien ça va coûter alors que je ne sais même pas combien vaut un caméraman ni même combien j’en aurai besoin!  Mais ce n’est que la pointe de l’iceberg.  Après avoir rempli les dits formulaires et participé à la session d’informations, il fallait maintenant attendre.  Alors, mon compagnon de travail et moi avons attendu…

 

Puis un coup de téléphone!  Le directeur de la SODEC m’appelle pour me demander si je veux toujours poursuivre ma demande de subventions.  « Bien sûr » je lui réponds.  Et le monsieur de rajouter un petit détail : « Vous savez Dominique, vous n’avez pas d’expérience dans la réalisation de courts métrages et vos 12 ans de mise en scène ne comptent pas. »  Ah bon…  Et alors?   « Eh bien M. Fortier, ceci implique si nous acceptons votre demande de subvention, votre nom ne pourra pas apparaître au générique de votre film. »  Oui, oui, vous avez bien entendu.  Même si j’ai écrit les dialogues et créé les personnages des A à Z, je ne pourrais pas avoir le crédit pour le scénario.  Seul mon compagnon de travail qui a réalisé deux courts métrages aurait droit de voir son nom au générique du film.  Ça impliquait aussi que je ne serais pas rémunéré et que je devais céder tous mes droits d’auteur à mon compagnon sinon; pas de subvention…

 

Est-ce que ça vaut la peine de donner ses droits pour voir son oeuvre à l’écran si personne ne saura jamais qui est derrière tout ça?  Est-il normal de donner si peu de pouvoir au créateur de l’œuvre?  Est-ce que le réalisateur est la seule personne à avoir de la reconnaissance?  Je n’ai pas eu à prendre la décision.  Mon compagnon de travail a trouvé cette situation si injuste qu’il a lui-même proposé d’abandonner le projet, ne voulant pas prendre tout le crédit pour une œuvre qu’il n’a pas créé.

 

Donc en attendant, je continue à monter des pièces de théâtre que je gère moi-même avec les gens que je veux et je n’ai pas à demander de faveurs au gouvernement.  Je m’en porte très bien d’ailleurs.  Et qui sait; peut être un jour, les têtes pensantes de notre industrie cinématographique vont finalement reconnaître un peu les droits des auteurs et alléger le processus d’adhésion aux programmes de subventions.  Après tout, ce ne serait qu’une simple formalité administrative…

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3 Réponses »

  1. J’arrive pas à y croire! C’est quoi cette merde là! Tu devrais continuer à nous faire des articles du genre pour qu’on se rendent compte de la merde qui se trame. Merci de m’avoir informée!!

  2. C’est vraiment moche de ne pas respecter les droits d’auteur. Mais Dom, honnêtement, crois-tu que tu aurais fini par l’avoir la subvention ? Sérieusement, je crois qu’on est rendu à l’ère de l’auto-financement… Vous voulez du cash pour nourrir la culture… arrangez-vous avec vos problèmes diront-ils!

  3. Tu as malheureusement bien raison mon cher Pierre-Luc. De plus en plus de scénaristes réalisent leurs films par leurs propres moyens. C’est encourageant de voir que certains peuvent se débrouiller et pondre un film très bien fait mais c’est triste aussi que ce soit aussi difficle pour des débutants de percer dans le milieu alors qu’ils ont du talent à revendre!

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