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Population pollution

Par • 19 mai 2008 à 21:12

Qu’est-ce qui ne va pas dans notre mentalité environnementale collective encore aujourd’hui ? Rien, diront certains, toujours rassurés par cette foi aveugle d’avoir un dossier vierge dans la gestion des cochonneries ambiantes! Et pourtant la santé et la propreté de la planète sont encore des sujets d’actualité que l’on peut décortiquer quotidiennement dans les journaux. Il doit bien y avoir quelque chose qui cloche, non ? Pouvons-nous identifier ce boulon « slaque » dans la plupart de nos têtes, cette pièce d’équipement qui nous fait défaut, ce morceau qui nous fait croire que tout va bien quand tout va mal ? On esquive l’effort, sous prétexte que d’autres personnes vont faire le grand ménage. Il y a un tas de mouvements écologistes sur la planète, et maintenant au Québec… Ils vont s’en occuper eux-autres. On se vante d’être écolo parce qu’on a un bac à recyclage dans le coin de la cuisine et un sac d’épicerie en toile verte. Et pour le reste, tout va bien parce qu’on s’en occupe. Mais évidemment, «on» exclue la personne qui parle. Et en matière d’environnement, la personne qui parle n’est justement jamais celle qui a la solution miracle. Le Québec est peuplé de grands parleurs, petits faiseurs.

Pas besoin de s’attarder aux grands enjeux comme celui du réchauffement de la planète ou celui du  protocole Kyoto pour la réduction des gaz à effet de serre pour s’inquiéter. En fait, les véritables grands enjeux se retrouvent principalement dans l’accumulation des petits enjeux que l’on laisse de côté, en négligeant tout bonnement leur importance. Mais au bilan, c’est l’ignorance du détail qui fait que l’on doit maintenant s’attaquer au bétail. Vous avez besoin d’exemples ?

Jeter son dévolu sur la rue

Combien de fois avez-vous croisé le marin sur le trottoir ? Je parle du marin sur les paquets de cigarettes Player’s qui traînent aux arrêts d’autobus, devant les dépanneurs et partout ailleurs, selon la bonne volonté du vent. Le tabagisme pollue déjà le système de santé et voilà qu’il s’attaque à l’écosystème. Les fumeurs n’ont pas assez de jeter leurs mégots par terre, ils jètent le plastique lors de l’ouverture du paquet et la boîte au complet à la fin. Cette accusation peut sembler généraliste, mais s’il n’y a pas de coupables, comment se fait-il qu’autant de paquets se retrouvent à flotter sur les flaques d’eau ?

Pourtant, il y a des poubelles pratiquement à tous les coins de rue et devant un bon nombre de commerces. Pour ce qui est des mégots, on retrouve des cendriers près des portes de plusieurs immeubles, mais il y a mieux encore. En effet, une jolie initiative est en train de passer totalement inaperçue, à cause des œillères de la résistance au changement qui masquent l’horizon des bonnes gens. Il s’agit du cendrier portatif (voir photo ci-contre) qui est en fait une petite pochette qui permet aux fumeurs de se débarrasser de leurs mégots proprement. On écrase en sécurité et on range le tout dans sa poche jusqu’au moment opportun pour s’en débarrasser intelligemment. La ville de Montréal en a distribué 100 000 lors d’une première offensive et il est toujours possible de s’en procurer aux comptoirs d’Accès Montréal. Mais ça ne semble pas suffire, loin de là. On offre une innovation, et ce gratuitement, et les résultats tardent à se faire sentir ou n’aboutissent simplement à rien. Si ça vous semble évident que les propriétaires de chiens aient à traîner un sac pour disposer des excréments de leur pitou, il est plutôt facile de tracer un parallèle avec les autres déchets dispersés en bordure des routes. On se fend en quatre pour mettre en place des mesures de propreté qui n’ont pas la portée de leurs ambitions. C’est ça le problème du Québécois de Cro-Magnon, ça lui prend une loi pour réagir. Pas une suggestion, pas une recommandation… une loi! Quand le commun des mortel recevra une contravention pour ce qu’il jette par terre, il va s’abstenir jusqu’à la prochaine poubelle. C’est dommage d’en être arrivé à ça. On se plaint des lois trop drastiques, mais on les provoque par notre conscience trop élastique. Pourtant, c’est tellement avant-gardiste d’agir avant la loi. En laissant le gouvernement imposer un comportement, on perd le mérite de nos accomplissements. Un Québec propre par procuration, c’est probablement notre destin!

Montréal est polluée. Moins qu’à une certaine époque et probablement plus qu’à une autre, mais de la pollution ça demeure de la pollution. Et nettoyer une ville – pardonnez-moi de faire tomber les mythes – ça coûte de l’argent. On parle de plans d’actions qui se chiffrent à plusieurs millions. Ça prend de l’argent pour faire rouler les camion-arrosoirs, pour faire marcher ses balayeurs ambulants au centre-ville, pour faire des études ou pour installer de banales poubelles. Polluer, en contre partie, ça ne coûte pratiquement rien. Balancer un gobelet de café par la fenêtre de sa voiture, ça ne demande rien d’autre qu’un coup de poignet. Laisser traîner une canette de boisson gazeuse sur un banc de parc, c’est gratuit aussi. Mais cette gratuité n’est valide qu’à court terme puisqu’il faudra bientôt assumer la facture salée – voire la facture salie – de notre négligence en tant que collectivité.

Les sacs, on s’en sacre!

Lorsque l’on met nos déchets dans une poubelle au lieu de les laisser tomber nonchalamment, en prenant bien soin de n’être vu par personne, c’est un premier pas dans la bonne direction. Mais il ne faut pas oublier que la gestion des déchets coûte aussi de l’argent. Du transport à l’enfouissement, il y a de jolis dollars qui sont jetés par les fenêtres. Et ça c’est sans parler des nombreux sacs verts dans lesquels nos ordures ménagères trouvent refuge. Ces fameux sacs prennent 400 ans avant de se décomposer et ils tuent de nombreux oiseaux et mammifères marins. La compagnie canadienne Eco II Manufacturing a développé des sacs qui peuvent mettre moins de deux ans à se désagréger, mais cette idée ne règle pas le problème à la source. Ce ne sont pas nécessairement les sacs qui sont un problème, c’est l’abus d’utilisation de ceux-ci. Réutilisons nos sacs, sacre bleu! À l’épicerie, on peut acheter des sacs réutilisables à partir d’un dollar. Rien ne vous empêche d’utiliser un sac-à-dos que vous avez déjà à la maison aussi. Il y a même des chaînes qui se fendent le derrière en quatre pour réduire la facture de 5 cents par sac de plastique épargné. L’achat de bons sacs, ça se rentabilise rapidement. Les petits sacs blancs dans la corbeille, on peut les transvider dans les grands sacs verts et les réutiliser, du moins s’ils sont encore potables. Ce n’est qu’une question de jugement.

Et le cycle recommence

Cette solution qu’est la réutilisation s’inscrit parfaitement dans les pratiques de recyclage et de récupération. D’ailleurs démystifions les deux termes :

Le recyclage est un procédé de traitement des déchets industriels et des déchets ménagers qui permet de réintroduire, dans le cycle de production d’un produit, des matériaux qui le composent. L’un des exemples qui illustre ce procédé est celui de la fabrication de bouteilles neuves avec le verre de bouteilles jetées puis récupérées.

La récupération, en contre-partie, c’est plutôt l’art de revenir sur sa décision de jeter un objet quelconque pour l’utiliser d’une manière qui peut différer de son usage d’origine. À titre d’exemple, vous pourriez vous servir d’un pot de cornichons vide pour ranger des clous. On peut aussi dire de plusieurs contenants consignés qu’ils sont récupérés.

Le point commun dans les deux cas, c’est qu’il y a moins de déchets dans les poubelles et conséquemment moins dans les dépotoirs. Mais il y a encore un mythe qui subsiste du côté du recyclage. Un mythe qui veut qu’on ne recycle que le papier et le carton. Trop de gens croient encore que le recyclage ne s’applique qu’à très peu de matières, mais c’est totalement faux. La plupart des contenants et emballages que vous utilisez à la maison peuvent être recyclés. Il suffit de nettoyer le matériel afin de ne pas introduire de produits indésirable dans la chaîne de recyclage. Mais la paresse gagne encore trop souvent le consommateur qui en a déjà marre de faire sa vaisselle. Mais une belle planète, un beau pays, une belle province et une belle ville, ça se paye en efforts à moins de vouloir – et je me tue à le dire depuis le début du présent texte – payer la note de façon monétaire.

Et la morale de cette triste histoire, pour la postérité…

Loin de moi l’idée de vouloir faire la morale avec un tel texte. En fait, oui je l’avoue… Je voulais secrètement me faire moralisateur, un peu comme un père qui surprend son enfant en train de se jouer dans le nez. Et l’image est excellente : c’est malpropre et ça ne permet pas d’utiliser ses mains pour faire un grand ménage. Malgré tout, je ne suis pas plus vert qu’un autre, mais le fait d’en parler n’est certainement pas une nuisance. Et j’aurai au moins le mérite de ne pas avoir fait imprimer ces lignes. Mais les mots ne règlent pas les maux; je n’accepte donc aucun mérite. La médaille, je l’accrocherai au cou de ceux qui donneront suite à ce qu’ils viennent de lire avec des gestes concrets.

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3 Réponses »

  1. On peut se demander si les Québécois sont adultes sur la question de l’environnement après un tel constat. Quand on applique la loi du moindre effort et qu’on attend toujours l’extrême urgence de la situation pour agir, il est généralement trop tard. Or, l’identité québécoise, c’est le sillage que l’on laisse derrière soi, pas ce que voudrait traverser en avant, c’est ça agir avant de parler.

  2. C’est si simple de recycler ses contenants et ses emballages. Je réussis à remplir au moins 2 sacs de récupération par semaine (maintenant ce sont des sacs et non des bacs dans mon arrondissement. Quelle mauvaise idée!!) Mais pour le reste, un petit effort pour un environnement sain, ça ne tuera pas personne!!

  3. Wow! J’adore le ton de cet article! Excellent vraiment! Et dire que j’ai failli l’imprimer pour le lire plus tard parce qu’il était passablement long, je me félicite presque en lisant les dernière lignes! Je recycle depuis longtemps aussi mais j’aimerais bien qu’on me prouve que ce que je fais sert à quelque chose, que les usines de recyclages fonctionnent à plein régime et que le contenu de mon bac bleu n’est pas retourné au dépotoir!

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