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Chronique classiques du cinéIl y a de ces films inoubliables. De grands réalisateurs au grand écran... du grand cinéma pour de grands moments!

Mort d’un Pourri : corruption naturelle (1977)

Par • 21 avril 2011 à 9:57

Il arrive de temps en temps que Georges Lautner délaisse la comédie pour réaliser des films plus sérieux. Avec son complice, le scénariste-dialoguiste Michel Audiard, il s’est ici aventuré, comme beaucoup de ses collègues avant lui, sur les sentiers de la critique politique au sein d’une intrigue policière, afin de dénoncer la corruption généralisé des élus. Comme nous sommes en ce moment en pleine campagne électorale, et que depuis quelques temps les médias ne cessent de nous parler de divers scandales de corruption impliquant l’Agence de Revenu du Canada et le milieu de construction avec la Mafia et la classe politique, voilà un film somme toute pertinent à voir et qui n’a pas pris une seule ride.

Après avoir tué un ministre nommé Serrano, qui voulait le forcer à démissionner pour des raisons de corruption, le député Philippe Dubaye demande l’aide de son ami Xavier Maréchal pour se constituer un alibi. Xavier accepte par amitié, mais apprend de la police que Philippe a aussi dérobé à Serrano un dossier compromettant pour la majorité des politiciens au pouvoir. Xavier parvient à le récupérer chez la maîtresse de Philippe, mais celui-ci est assassiné peu après.

De nombreuses personnalités haut placés entrent en contact avec Xavier Maréchal et lui enjoignent de leur remettre le dossier Serrano. La police, qui le suspecte du meurtre de Philippe, encourage Xavier à remettre ces documents aux autorités concernés. Xavier s’entête à refuser toutes ces demandes afin de découvrir coûte que coûte l’identité de l’assassin de Philippe malgré les tueurs lancés à ses trousses. Lorsque l’épouse de Philippe meurt assassinée, Xavier publie quelques documents du dossier Serrano aux journaux, ce qui déclenche un scandale politique profond. L’étau se resserre autour de Xavier, tenace dans sa tentative de démasquer le meurtrier de son ami.

Avec la diversité des ramifications et le nombre élevé de personnages impliqués, c’est dire si le récit, adapté d’un roman de Raf Vallet, pseudonyme de Jean Delion, est assez complexe, touffu et ambitieux. Le spectateur ne risque pourtant pas de s’y perdre puisque la mise en scène est bien huilée, le rythme est rapide et les rebondissements sont ingénieux.
Les scènes d’action et de suspense sont conçus évidemment pour attirer un plus large public, mais elles interviennent toujours au moment voulu et sont techniquement impeccables sans être trop nombreuses.

Mais au-delà de l’efficacité technique, c’est cependant encore une fois la qualité des dialogues de Michel Audiard qui retient l’attention. Il n’a pas son pareil pour écrire des réparties brillantes au vocabulaire et au verbe dénonciateurs qui mitraillent sans relâche pour dénoncer la corruption généralisée des politiciens et leur collusion avec le milieu corporatiste des affaires.

Pour être franc, de ce long-métrage ressort un vision amère et désenchantée du milieu de la politique qui risque d’alimenter davantage le cynisme actuel de la population envers les élus du peuple, pour qui le bien commun est devenu davantage une promesse bonne à jeter aux vidanges plutôt qu’une considération essentielle.

MORT D’UN POURRI se révèle donc une réussite du genre, d’autant plus que le propos critique qui y est présenté est toujours d’actualité, comme quoi il n’y a pas eu une grande évolution des moeurs parmi les gens du pouvoir depuis trente ans; la corruption étant tellement dans l’ordre naturel des choses qu’il ne faut pas espérer que cela change de sitôt.

Une superbe équipe d’interprètes, incluant entre autres le suave Klaus Kinski et la ravissante Ornella Muti, vient solidifier une distribution imposante autour d’un Alain Delon assez efficace.

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