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ÉditorialPuisqu'il y a des choses qui doivent être dites, aussi bien les dire avec une verve franche et directe. Des sujets chauds, traités vivement sans trop de fioritures.

Ma gang de malades, vous êtes donc où ?

Par • 23 août 2007 à 0:00

Ah que c’est important, la santé. Plus que le travail, que l’argent, c’est facilement la deuxième chose la plus importante dans notre société, après la vie elle-même. Alors notre bonne santé d’Occidentaux civilisés et passionnément attachés à notre qualité de vie jusqu’au dernier souffle, on est prêts à se la payer. Sans compter. Ça coûte des milliards ? Pas de problème. Le système actuel ne fait pas le travail ? On a la solution : d’l’argiiiiin, encore plus d’argiiiiiin !!

 

En 2007, le budget du Québec pour la santé a augmenté de 6%, s’établissant à un chiffre record de 23,8 milliards de dollars. Relisez la phrase. Vingt-trois, point, huit, milliards de dollars. Pas des pesos dominicains, pas des lires italiennes ou des francs CFA. Des foutus dollars canadiens qui, on doit l’avouer, ont de plus en plus une réelle valeur quand on les compare à d’autres devises. Une dépense de 3132 dollars par Québécois, et nous sommes plus de 7 millions six cents mille. 44,3% des dépenses totales accordées au Ministères. Et rien qui puisse nous faire penser que l’hémorragie va cesser de sitôt.

 

What the fuck ? Quel genre de système mérite autant d’argent, autant de place dans le budget d’une nation ? Le Ministère des Palais en Or Massif peut-être, ou encore le Ministère du Détournement de Fonds… Mais un système de santé ? Pour un pays riche, qui n’est pas en guerre, qui n’a pas connu d’épidémie mortelle depuis la grippe espagnole de 1918, c’est bizarre. Oui, la population vieillit, mais elle ne gagne pas 5 ans à tous les six mois, cette population, quand même. Mais bordel, qu’est-ce qui coûte si cher ? VINGT-TROIS PUTAINS DE MILLIARDS DE DOLLARS POINT HUIT !!!

 

On le sait, le Parti Québécois a fait une erreur magistrale, a déclenché une lente agonie de notre bien-aimé système de santé en 1994 en débutant ce qui serait plus tard connu sous le nom de « virage ambulatoire ». De 1995 à 2002, comme pour punir les Québécois de ne pas avoir dit Oui au dernier référendum, le gouvernement de Jacques Parizeau, suivi de Lucien Bouchard et de Bernard Landry, a multiplié les coupures dans presque tous les ministères. Puis, fidèle à la tradition lorsque le pouvoir est transféré à un autre parti, le PLQ de Jean Charest a fait le contraire, réinvestissant massivement, surtout en santé. Pour la population vieillissante, dit-on. Pour réparer les erreurs du précédent gouvernement, clame-t-on. Autre erreur. Avez-vous le sentiment qu’au Québec les choses vont mieux dans le réseau hospitalier ? Avez-vous attendu moins de quatre heures lors de votre dernier passage à l’urgence, avez-vous obtenu votre rendez-vous pour une chirurgie dans les six mois ? Et même si vous dites oui, on n’a qu’à demander au personnel des hôpitaux si les choses se sont vraiment améliorées. Si telle personne n’est pas morte au bout de son sang, si monsieur X a fini par avoir sa greffe, si madame Y est suivie régulièrement depuis son opération, c’est grâce à eux, et à peine grâce à nos milliards.

 

Le problème dans le système de santé québécois en est un de gestion. On aurait beau faire passer le budget de 24 à 60 milliards de dollars, on aurait le même système pourri : des attentes interminables et inacceptables, du personnel épuisé et démoralisé, des irrégularités, des mésententes entre syndicats et comités patronaux, des contribuables floués. Le PQ avait de bonnes intentions, mais a coupé les vivres à un système malade, gangrené, ce qui n’a eu comme effet que d’empirer drastiquement les choses ; le PLQ, véritablement bien intentionné aussi, n’a cependant pas réfléchi une seule minute et, en panique, est retombé dans le même vice qui le caractérisait lorsqu’il était au pouvoir entre 1985 et 1993 : il dépense et dépense encore, en espérant que les choses vont (enfin) s’améliorer en injectant tellement d’argent.

 

Il faut revoir notre façon de penser, et très vite. Le système de santé à deux vitesses, s’il permet de faire une malheureuse et déchirante comparaison du riche par rapport au plus pauvre, est néanmoins une avenue à envisager, parce qu’il faut d’abord remettre sur les rails notre système public qui a trop souffert de cette gestion d’incapables. Personne ne sait vraiment qui est responsable de cette faillite qui a causé une augmentation du ratio du budget alloué à la santé de 14% entre 1980 et 2006 (de 30.6 à 44.3 pourcents, et c’est une proportion, pas une augmentation brute), mais au lieu de faire des enquêtes bidon sur des viaducs qui tombent parce qu’un gars s’est pogné le cul voilà 37 ans, on devrait peut-être faire une enquête sur qui fourre le Québec en entier via le financement du système de santé, lui aussi en train de s’effondrer. Contrairement au dit système, je suis prêt à ne pas regarder la dépense pour quelque chose comme ça, parce que je suis convaincu qu’on y gagnerait au change.

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7 Réponses »

  1. Je ne connaissais pas tous ces chiffres et c’est clair que ça choque. Mais câlisse, allez dire au monde que vous allez moins investir en santé et vous perdez 50% de vos votes! Donc c’est juste une grosse game politique qui se joue. On augmente les fonds en santé pour garder la cote et on se balance de la gestion. C’est un peu comme si une machine distributrice de Coke gobait notre dollars sans nous donner notre liqueur… et qu’on continuait à mettre de l’argent dedans en espérant avoir quelque chose à boire un moment donné. Il faut l’ouvrir et la réparer la foutue machine… Aller voir ce qui ne va pas au fin fond des rouages! Très belle sortie M. Habel, je vous seconde sur toute la ligne. Ma gang de malades, vous êtes donc où ? Au gouvernement, c’est clair!

  2. Merci monsieur Gagnon, ton exemple de la machine distributrice est excellent, sauf que le contribuable ne s’aperçoit pas qu’on continue à mettre des dollars dedans. Il voit les chiffres passer, mais il ne se forme pas d’image, il ne se rend pas compte suffisamment du caractère astronomique et auto-destructeur d’une telle manière de penser. Wake up, people ! C’est pas avec des pensées magiques et des dollars saupoudrés un peu partout qu’on règle les problèmes.

  3. Là où il y a les humains et l’argent (beaucoup d’argent) il y a la corruption. Évident, connu. Nous, en bas des connaisseurs en matière de soins, on peut facilement déceler des pertes de temps simples et qui coûtent de l’argent au gouvernement.
    Voici un cas simple : j’ai besoin d’une copie des résultats d’une prise de sang. Simple réponse direz-vous, va au CLSC, ils vont te faire une photocopie… Erreur! Ce papier est protégé par les archivistes de l’hôpital qui a fait l’analyse du sang! Eux doivent faire la photocopie! Il faut donc remplir un formulaire et attendre une semaine pour avoir ta copie! Perte de temps vous dites? Perte d’argent! Et surtout ridicule. Trente secondes auraient suffit à la réceptionniste du CLSC pour faire une photocopie au photocopieur à côté d’elle.
    Jonathan, tu cherches où va l’argent? Il sert à tous les services autres que médicaux. Trop de paperasses, de bureaucratie.

    J’ai fait affaire avec le privé deux fois déjà dans ma courte vie. 80 $ pour une échographie d’urgence et 30$ pour des vaccins. Je dois avoir attendu 10 minutes au total pour les 4 rdv pour les vaccins et je n’ai pas attendu pour l’écho.
    Tu as raison Jon, le problème c’est la gestion. Il y a présentement trop de personnes qui gèrent ou plutôt qui essaient de gérer quelque chose de trop gros pour eux. Les compagnies privées commencent petites et les gestionnaires apprennent à gérer plus l’entreprise grandit. Ils gagnent leur argent selon s’ils font ou non une bonne gestion de leur affaire. La plupart des gestionnaires au gouvernement sont seulement excités d’avoir plus d’argent à distribuer, ils ne le gagnent pas vraiment, ils ne comprennent donc pas sa valeur et ne l’investissent pas correctement par la suite. Voilà.

  4. Je pense que notre système de santé est à l’image de notre gouvernement. Ramifié à souhait, rempli de gens qui pourraient être compétents dans des situations normales et des coins noirs pour laisser couler l’argent. Quand un compagnie va mal, on la ferme si on arrive pas à la redresser, et on recommence ailleur, en plus petit. Je suis pour le système de santé à 2 vitesses à condition que nous puissions avoir le choix de ne plus investir dans le système de santé social publique. Mais faire un tel choix, c’est de renier le côté « social » que s’est donné le Québec. Quelle est la solution? Les gens qui vieillissent n’auront pas toujours l’argent pour aller vers le privé alors si les jeunes comme moi arrêtent de payer le service public, on va manquer de sous avant même d’avoir commencé à y penser. Je pense donc que la solution que Monseigneur Habel nous a décrite reste au moins un bon pas dans la bonne direction. Accordons une place au privé mais travaillons fort à reconstruire le système qui pourrait au moins se désengorger légèrement. En autant que ça fonctionne!!

  5. Qu’est-ce que vous voulez qu’ils fassent? Ma grand-mère n’aurait plus Jean Charest comme son « plusse préféré » si il n’offrait pas mieux que ses rivaux en matière de santé. C’est plus un jeu de mains, jeux de vilain: c’est un jeu d’argent, jeux de gens contents. Une game de société. Ça va passer? Je suis comme vous et je crois que non… je suis pessimiste peut-être. Comme beaucoup d’autre, je crois beaucoup en des PPP, mais que voulez-vous, ça aussi c’est un problème collectif, de société. On investie, on analyse pas! Suis-je le seul à trouver, quand le gourvenement se met à analyser, que y’a un paquet de personnes qui s’en mettent plein les poches et que ça sert généralement à rien! Ça nous tue tranquillement… Je veux pas faire mon analyste de société, mais je trouve tellement que le Québec est dans une « boule à hamster » depuis quelques années. On essaie d’innover avec des trucs comme la comission Bouchard & cie. mais on se rend compte que ça aurait été mieux de piger une loi au hasard dans un bol. La seule chose qui peut me remonter le morale c’est mes deux payes reçuent en même temps… accompagné de mon chèque de vacances!

  6. Le look, l’âge, l’orientation sexuelle, les promesses ponctuelles, la couleur de la cravate… Tout ça décide de qui va gouverner le pays beaucoup plus que les vrais idées malheureusement. Pourquoi pensez-vous que l’ADQ a tellement surpris aux dernières élections?? Parce que pour la 1ere fois depuis des lunes, le peuple a voté EN PARTIE pour les idées de Super Mario plutôt que la coupe de cheveux de Charest et la cravate de Boisclair. Dumont en était le 1er surpris!! Pour changer l’opinion populaire sur un gouvernement, ça prend au moins 2 mandats… Je sais pas pourquoi mais c’est ainsi. J’imagine que les gens âgés recherchent une certaine stabilité… Désespoir!!

    Jean Rochon a scrapé le système de santé et tu as raison Jo, depuis ce temps, le PQ l’a encore plus massacré et les libéraux de Charest l’ont gavé d’argent sans en changer la lourde structure administrative. Mais que voulez-vous chers amis; on a voulu des syndicats puissants; eh bien, ils sont si puissants maintenant qu’ils empêchent même les gouvernements d’avancer dans les dossiers les plus urgents. On veut moderniser le système de santé pour le rendre plus efficace? On veut alléger la bureaucratie administrative gouvernementale? Il faut d’abord faire tomber les syndicats qui paralysent tout le système! Et je ne défends pas le gouvernement car c’est lui qui a accordé autant de pouvoir aux syndicats… SVP Jo, fais un article sur le pouvoir des syndicats et donne-nous ton opinion! C’est un sujet chaud que malheureusement trop peu de gens en réalisent l’importance!

  7. Le pouvoir des syndicats est un sujet que je me promets d’entamer (humblement) bientôt. Ceci dit, comme d’habitude les gens apportent d’autres détails, d’autres angles et d’autres explications aux sujets que j’aborde ; content de le constater. Vous avez tous apportés des points qui définissent avec encore plus de précision la situation quasi catastrophique dans lequel nous sommes plongés.

    N’est-ce pas une honte et une amère déception que les Québécois en soient rendus à vouloir délaisser un système de santé public, autrefois une fierté ? On sait que ce système peut marcher, il marche encore ailleurs, et il a été parfaitement fonctionnel ici pendant 30 ans. Mais il est tellement pourri de l’intérieur que les gens commencent à accepter l’impensable : que les plus riches aient accès à un autre système parallèle, plus rapide et de meilleure qualité, pourvu que cela désengorge un tant soit peu le système actuel et ne provoque pas l’effondrement pur et simple de celui-ci.

    Dans bien des aspects, et même de façon générale, je crois que le monde est constamment en amélioration (qui voudrait « vraiment » vivre en 1930, sérieusement), mais certains domaines régressent bel et bien avec le temps.

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